"Il a un violon dans la tête" - Un funambule sur le sable - Gilles MARCHAND -
Un funambule sur le sable
Gilles MARCHAND
Editions : Les Forges de Vulcain - Août 2017 –
Rentrée littéraire 2017
#MRL2017
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Il est certains auteurs qui, dès les premières lignes, par quelques phrases, savent vous saisir par le cœur, par les tripes. Gilles Marchand est de ceux-là . J’ai encore en mémoire les premiers mots de son précédent roman « Une bouche sans personne ». Ce « funambule sur le sable » m’a happée de la même façon. D’entrée de jeu. Et pan !
« Il a un violon dans la tête » : loufoque, absurde, me direz-vous ! Je vous répondrai : bouleversant, poétique, délicieusement humain, drôle, empathique, tendre…. Je vais m’arrêter là car il faut bien parler du livre non ?
Stradi naît avec un « drôle » de truc... Comme vous l’avez découvert plus haut, il a un violon planqué dans la tête. Un handicap inconnu. Tout nouveau. Du sur-mesure. Sacrée différence non ?
Invisible, tapie quelque part sous son crâne, elle l’isole pourtant, le stigmatise. Comme tout handicap, comme toute différence. Et pourtant, elle fera aussi sa force. Il va puiser en elle des ressources poétiquement inouïes, à commencer par ces dialogues avec les oiseaux, enchantés par le son du violon, et cet amour de l’océan, du large… Parce qu'il y trouve la Paix. Il cassera avec la littérature les barreaux de sa prison. On retrouve au fil des pages de multiples références littéraires, l’une de mes préférées étant celle à Romain Gary (auteur qui m’est cher et que l’on retrouve d’ailleurs en épigraphe du roman) : « Seul l’Océan a les moyens qu’il faut pour parler au nom de l’homme ». Et puis, il y a cette amitié , cette belle amitié avec Max, passionné de musique, un autre éclopé de la vie . Il y a l’amour, celui pour la belle Lélie, il y a l’espoir, il y a la question de la vie à réapprendre quand le violon ne chante plus…
La thématique du handicap est abordée avec Pudeur (majuscule), Poésie (majuscule) et Lumière (majuscule). Je ne pouvais qu’y être extrêmement sensible, puisque j’ai choisi de côtoyer, professionnellement, des enfants qui ont un violon dans la tête, un violon qui les empêche de communiquer avec des mots, qui leur offre la musique du cœur et des yeux.
« Un funambule sur le sable » est une sacrée leçon de vie et de tolérance, une ode poétique lancée au visage d’une société qui a bien du mal encore à accepter concrètement la différence, une fable solairement humaine, un régal pour l’âme. On referme ce roman en se disant que finalement, funambules, nous le sommes peut-être un peu tous , sur les sables mouvants de nos vies.
"À vrai dire, je me suis toujours senti comme un funambule. J’ai avancé dans cette société en prenant mille précautions. Légèrement au-dessus, un peu au-dessous ou complètement à côté, je ne sais trop où, mais jamais en son sein. Je me suis maintenu en équilibre tant bien que mal, sachant que je pouvais chuter à tout instant. J’aurais pu considérer mon violon comme un don de la nature mais il était trop lourd à porter. J’ai avancé dans la vie comme un funambule sur le sable, avec un don que je ne pouvais pas utiliser, empêtré et maladroit."
J’ai fait cette lecture dans le cadre de ma participation aux #MRL17, merci à PriceMinister- Rakuten et aux marraines qui m’ont permis de pleurer à chaudes larmes, et de découvrir cette pépite !
© Nath