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Un bonheur sans pitié

Eric GENETET

Editions Héloïse d’Ormesson – Mai 2019

 

Il y a ces bonheurs, ces passions folles, ces coups de cœur, ces coups de foudre, ces alchimies soudaines qui vous tombent dessus , comme ça.  Des évidences, des attirances, des certitudes épidermiques qui font que l’on pense que c’est forcément pour la vie.

Il y a ces carences, ces peurs, ces doutes, ce besoin abyssal d’aimer et d’être aimée en retour. D’être choisie. 

Il y a ces solitudes qui se télescopent. Pour le meilleur et parfois pour le pire. Ces navires qui ne devraient peut-être jamais se croiser.

Lorsque Marina et Torsten se retrouvent sur un réseau social bien connu, après avoir été,  par le passé,  camarades de lycée ,alors unis par un baiser échangé à l’arrière d’une voiture,  c’est le début d’une passion amoureuse, absolue,  charnelle,  irrésistible et ravageuse.  De celles dont on pense que c’est pour la vie.

« Nous sommes en fusion, certains que nous ne pourrons plus jamais respirer l’un sans l’autre »  (Marina)

« »Avec Marina, je ne me perds plus, j’ai la certitude d’être aimé….Elle change ce que je connaissais du temps, du vent, de l’amour et de la perfection, comme si  c’était la fin du monde dans cinq minutes » (Torsten)

Seulement voilà, Torsten révèle bientôt  son véritable visage. Celui d’un tyran violent, jaloux, pervers,  manipulateur et destructeur.  Malgré cela, en dépit des humiliations quotidiennes,  et des ignominies qu’elle subit, Marina refuse de le quitter, persuadée que son amour chassera les démons qui le rongent et qu’ils finiront bien par être heureux.

« Est-ce que tous les hommes qui agissent de cette façon ont des remords, sauf Torsten ? Qui serait assez sotte pour se laisser traiter comme ça ?  Je n’aurais jamais imaginé devenir  cette fille-là. Personne ne peut comprendre pourquoi je ne quitte pas Torsten parce que je l’ignore moi-même… »

Lui, le mâle (le mal ?), tisse sa toile jour après jour. Celle de l’emprise, de l’incarcération  mentale, de la destruction de l’autre.   La naissance d’un enfant ne changera rien. La violence perdure, la maltraitance aussi.  Le cloaque, toujours. Celui de  la dépendance affective, que le bourreau nourrit , coupant la victime de toute relation sociale, familiale ou professionnelle, devenant son unique référent.

La route est longue jusqu’à la libération , jusqu’ à ce que les barbelés sautent  pour de bon.

« La vie est un ciel de traîne un jour de mistral,  le soleil finit toujours par briller entre les nuages noirs »

J’ai été profondément bouleversée par cette lecture, qui a ravivé quelques fantômes d’une vie d’avant celle-ci.   S’il peut sembler totalement incohérent de rester, de continuer à subir , et ce en toute lucidité, il faut comprendre ce que peut représenter la dépossession d’une âme, la destruction de soi.   

Eric Genetet aborde avec justesse, empathie, intelligence et sensibilité un sujet fort douloureux.    Il l’appréhende « de l’intérieur », prêtant sa main et sa voix à tous les personnages,  y compris celui qui fait mal.   On découvre ainsi  le phénomène de l’emprise  tant  par le regard de la victime, que par celui du  bourreau. 

Coup de cœur, coup au cœur !   Une lecture difficile, jonchée bien souvent de larmes, je vous l’avoue. Mais il en reste le Bonheur actuel d’être debout.  Libre. Comme Marina.

Je remercie les Editions Héloïse d’Ormesson, grâce à qui j’ai p u découvrir « Un bonheur sans pitié » en avant-première.

© Nath

NB : N'hésitez pas à découvrir les autres romans d'Eric, sa plume est de celles qui me tiennent particulièrement à coeur car profondément humaine. Et ça fait du bien ! Vous trouverez d'ailleurs ici ma chronique de  "Tomber" (gros gros coup de coeur également !)