Maman, toi qui m'aimes tant - Fugitive parce que reine - Violaine HUISMAN
Fugitive parce que reine
Violaine HUISMAN
Editions Gallimard – Janvier 2018
Edition présentée : Folio - Avril 2019
Je ne l’avais pas lu lors de sa parution initiale, c’est avec joie (et un peu d’appréhension je l’avoue) que je l’ai découvert en format poche, aux Editions Folio, que je remercie grandement pour cette très belle lecture.
L’autrice, Violaine Huisman, livre dans ce premier roman un récit époustouflant de beauté. Vous savez, cette beauté à fleur de peau, que l’’on pourrait presque toucher du bout des doigts tant elle est imprégnée dans chaque ligne, dans chaque page, tant elle peut aussi faire mal. Fugitive parce que reine, c’est Catherine, cette mère si particulière, si excessive en tout, si peu encline aux convenances, si libre, si déchirée, si abîmée, si fantasque, si détestable, si attachante, si fragile, si forte, si vulnérable, si effrayante parfois. Une maman « maniaco-dépressive ». Une maman « malade ».
"Maman avait toutes sortes de troubles du comportement , et on aurait pu aussi bien brosser son portrait sous forme de listes de pathologies: schizophrénie , mythomanie, kleptomanie, alcoolisme, tour à tour neurasthénie et hystérie .
Elle pouvait être survoltée ou terrassée , bouffer comme quatre ou se laisser dépérir , elle était excessive en tout ..."
Le livre est découpé en trois parties, lesquelles s’imbriquent parfaitement. Tout d’abord, Violaine déroule le fil de son enfance, marquée par la chute du Mur de Berlin et la révélation de la maladie de la maladie de sa mère, des conséquences sur sa propre vie et sur celle de sa sœur. Leurs peurs, leurs interrogations, et ce lien fusionnel qui les unit tout de même toutes les trois. Trois pièces d’un même puzzle, incomplet dès lors qu’il en manque une. Une mère-paradoxe.
Dans la seconde partie, pour être au plus juste de l’histoire de Catherine, l’autrice franchit une frontière et c’est son point de vue que l’on découvre. C’est la partie qui m’a le plus émue. Peut-être parce que toutes les fêlures, toutes les fractures de cette femme l’ont rendue plus touchante, plus « aimable » Sans doute parce que ces mêmes failles ont ouvert un rai de lumière sous la porte .
La dernière partie relate la fin de vie de Catherine. Le « je » revient, comme pour boucler l’histoire. « Je » au début. « Je » en conclusion. Comme une parenthèse qui se referme sur l’existence de cette femme fantasque. Libre. Avec un L majuscule. Cette mère mal aimante, car mal-aimée. Trop aimante. Entre nectar et poison.
Alors, forcément, on se demande comment devenir adulte, comment se bâtir sur des fondations maternelles aussi bancales ? Comment découvrir son propre reflet, quand il a été flouté dès l’enfance ? Comment conserver le meilleur d’une mère fugitive ? Sans doute parce qu’elle fut Reine. Sans doute parce qu’elle fut Libre.
J’ai beaucoup aimé cette histoire de femmes, celle de ce trio lié par un amour inconditionnel, aux confins de ce je ne sais quoi que l’on nomme parfois folie.
L’écriture est superbe, magnétique. La fin est sublime ! Un régal que je vous conseille vivement de découvrir !
« La vérité d'une vie n'est jamais que la fiction au gré de laquelle on la construit »
© Nath