Soleil amer - Lilia Hassaine
Soleil amer
Lilia Hassaine
Editions Gallimard - Août 2021
Rentrée littéraire
Dans les années 1960, Naja vit et élève seule ses trois filles dans une Algérie récemment indépendante et encore blessée par le conflit que l'on connaît. Saïd, l'époux de la jeune femme, est parti, comme bien d'autres, chercher fortune et travailler en région parisienne.
Les années passant, et grâce à une promotion, la famille est réunie et se retrouve bientôt dans une cité HLM. De celles qui , flamblant neuves, tentait de faire oublier l'infâmie des bidonvilles que d'autres auteurs, tels Mehdi Charef (je vous conseille "Rue des Pâquerettes) ont si bien raconté.
C'était le temps des fontaines qui donnaient encore de l'eau, de la mixité sociale, le temps d'avant...
La vie va s'organiser, autour d'une solidarité féminine, où chacune va trouver sa place et s'épanouir.
Trois décennies vont s'écouler sous la plume de Lilia Hassaine, trente années de vie. Trente années, ça semble si peu, dit comme ça. Trente années scellées par un secret, par des désillusions, par le poids des traditions qui demeure très présent. La nostalgie côtoie la lumière, en permanence. Il y a là de solaires portraits de femmes, attachantes, fortes, et forcément attachantes.
Ce roman est celui de la mémoire perpétuée, de la dualité qui colle à la peau quand on est d'ici et d'ailleurs, et de nulle part concrètement.
Immigration, tradtions, émancipation, filiation, gémellitté, dénonciation du mépris envers ces laisssés pour compte, hérédité, poids du secret, hommage à la littérature et aux mots salvateurs, l'autrice aborde avec un talent immense tous ces thèmes (et tant d'autres) dans un roman bouleversant que j'ai dévoré en quelques heures et qui a toute sa place, sans nul doute, sur mon podium de joyaux de cette rentrée littéraire.
Je reconnais sans mal avoir plusieurs fois versé ma petite larme. J'ai été séduite, et c'est un euphémisme tant par le fond que par la forme. Sans doute parce que l'écriture est sublimissime, peut-être aussi parce qu'une petite partie de moi-même s'est reconnue dans l'histoire.
J'avais adoré "L'oeil du paon", je suis en amour absolu pour cette grosse claque que fut pour moi Soleil amer !
"Ta fatigue te rend belle, Naja. On devrait apprendre à aimer les traces du passé, les rides qui ressemblent à des larmes, celles qui témoignent d'un caractère anxieux et marquent le front. Les visages qui vieillissent le mieux sont ceux qui ont vécu"
© Nath