286375464_10220248252811758_6602003025013304275_n

 

Ceux qui s'aiment se laissent partir
Lisa Balavoine
Editions Gallimard - Mai 2022

J'avais ressenti un énorme coup de coeur pour "Eparse", le tout premier roman de Lisa Balavoine, pour cette écriture fragmentée, à l'image de la vie, éparpillée, parfois disloquée.

C'est avec un énormissime plaisir que j'ai dévoré "Ceux qui s'aiment se laissent partir", histoire en trois parties, cri d'amour à une mère morte, récit d'une relation à la fois fusionnelle et toxique. Une maman fantasque, libre, aux histoires d'amour comme la maison de paille des trois petits cochons. Une mère-femme, une fille qui le deviendra, deux tortues aux carapaces qui s'entrechoquent. Une mère capable de couvrir sa fille de cadeaux, et de balancer par la fenêtre une poupée. Une mère qui change de maison comme on change de chemise, qui aime la musique, passion léguée à son enfant. Une mère-matrice, matriarcale, une maman solo, qui use, abuse, se détruit peu à peu. Une de celles qu'il faut quitter si l'on ne veut pas sombrer soi-même.

Passer du "Je" au "Tu" renforce cette impression d'intimité que l'on ressent dès le début de la lecture et qui colle à la peau jusqu'au dernier mot.

C'est l'histoire d'une mère qui colle à la peau, sous la carapace, en haut à gauche, là où ça palpite. Une mère et une fille qui n'ont jamais pu, jamais su dire "je t'aime".

C'est l'hisoire d'une enfant "silencieuse" . "Dans la cour, on m'appelle la muette. Je ne sais pas quoi répondre lorsqu'on me demande si ça va".

Il y a Lisa enfant , et puis Lisa qui devient mère à son tour. D'une fille. Un peu comme si l'histoire se répétait.
"J'ai quitté ma mère pour devenir une mère. Je pensais qu'avoir des enfants me donnerait les mots pour écrire une nouvelle histoire".

Si j'ai tant aimé ce roman, c'est parce que la thématique abordée me touche de très très près. Que la quête est là, au creux du ventre, tout en sachant qu'elle sera inaboutie. C'est aussi que je porte ce patrimoine, tout au moins génétique, et que pour moi aussi une partie de l'histoire s'est répétée.

Lisa évoque la musique comme pansement. C'est ce que ce livre est pour moi. Un sparadrap sur mes cicatrices les plus profondes.

Coup de foudre pour "Ceux qui s'aiment se laissent partir", dont je vous recommande vivement la lecture !

"Tu répètes sans cesse que tu veux mettre fin à tes jours. Je ne comprends pas le sens de cette expression. Une après-midi, à l'étude, je cherche dans un des dictionnaires de l'école. Je trouve la définition de "fin" puis celle de "jour". Cela n'éclaire rien. Je n'ose pas poser de question".

© Nath